On vous en parlait la semaine dernière à l'occasion de la sortie de son nouveau clip : c'est aujourd'hui que paraît Maya, le premier album de musique électronique que John Frusciante publie sous sa propre identité. Un disque en hommage à son chat qui marque pour de bon son retour sous le feu des projecteurs.
Avant de rentrer dans le vif du sujet, petit disclaimer : nostalgiques des solos incandescents de ce bon vieux John, passez votre chemin. Ou alors prenez une tisane, faites un tour sur une vidéo de ses plus beaux exploits guitare à la main (un best-of du live à Chorzow, par exemple) et revenez une fois que votre petit coeur sera apaisé. En tout cas, on vous aura prévenus : depuis quelques temps, notre guitar hero préféré a remisé sa Strat' au placard pour s'entourer de boîtes à rythmes et préfère désormais les samples au chant. C'est comme ça. Et même si on fait partie de ceux qui ne peuvent pas s'empêcher d'imiter ses choeurs même sur les morceaux où il n'y en a pas, on préfère se réjouir du retour d'un artiste qu'on s'était presque résolu à ne plus jamais revoir dans le monde réel.
Car tout n'est pas à jeter dans ce nouvel album, bien au contraire. Évidemment, il est inutile d'espérer y retrouver ce qu'on adorait chez John Frusciante au début des années 2000. Mais sa manière de composer, son sens de la mélodie et sa vision de la musique se cachent dans les moindres détails de ces morceaux foisonnants et variés, laissant entrevoir une méthode de travail fascinante : "un an avant de me mettre à travailler sur ce disque, j'ai commencé à m'imposer des limites et des règles pour rendre le processus de création aussi difficile que possible. Je programmais pour programmer. Après une année entière à travailler de cette manière, j'ai décidé de rendre les choses plus faciles, de manière à pouvoir terminer des morceaux qui me plaisaient tout en continuant à pratiquer. Tout au long de l'enregistrement de Maya, je passais énormément de temps à préparer chaque morceau mais une fois lancé, je les terminais très rapidement parce que j'avais passé des semaines à faire des breakbeats, à bidouiller des boîtes à rythme, à faire des patches de synthé...".
Le résultat, c'est donc ce disque dont l'apparente confusion laisse place à une étonnante richesse au fil des écoutes. Brand E en est d'ailleurs la meilleure porte d'entrée, puisqu'on y retrouve avec plaisir les expérimentations accessibles de l'époque Letur-Lefr/PBX Funicular Intaglio Zone. De l'ultra-rythmée Usbrup Pensul à l'aérienne Blind Aim en passant par l'étonnante Zillion, on finit par se laisser emporter par une musique qu'on ne comprend pas toujours, mais qui nous convainc de lui accorder une chance et de nous plonger dans une expérience nouvelle. Car à l'arrivée, il faut se rendre à l'évidence : près d'une décennie après leur commencement, les frasques électroniques de John Frusciante ont toute leur place dans l'immense héritage musical qu'il laissera au monde.
Si cet album ne contentera pas les aficionados de la sobriété acoustique de Shadows Collide With People ou de la richesse mélodique de The Empyrean, il aura au moins le mérite de témoigner de la fascinante évolution musicale de John Frusciante et de cette soif dévorante de nouveauté qui fait de lui un artiste absolument unique. Avant le retour qu'on attend toutes et tous avec impatience, prévu pour l'année prochaine.